La nouvelle révision de la LACI

Le projet de révision de la LACI qui propose de faire passer de 12 à 18 mois le nombre de mois cotisés nécessaires pour l’obtention de 400 indemnités journalières, remet gravement en cause l’avancée de ces dernières années.
En effet, les nombreuses données recueillies en Suisse romande par le Fonds d’encouragement à l’emploi des intermittents du spectacle et de l’audiovisuel confirment la situation suivante: un intermittent travaille en moyenne 8 à 9 mois sur 24. Il s’agit en fait de 3 à 4 spectacles sur deux ans, car comme le relève une enquête du Syndicat Suisse Romand du Spectacle, le temps moyen de création d’une pièce est de 2.43 mois. A l’heure actuelle, avec le doublement des 30 premiers jours de ses emplois effectifs, l’intermittent totalise 12 à 13 mois cotisés et reconduit ainsi un nouveau droit à 400 indemnités journalières, qui lui permettent de couvrir les 15 à 16 mois d’intervalles sans emploi. (Voir Tableau 1 en annexe)

Si le projet de révision 2009 de la LACI est accepté, le doublement des 30 premiers jours ne suffira pas à obtenir les 18 mois de cotisation demandés. Dès lors, l’intermittent n’aura droit qu’à une couverture de 260 indemnités et il lui manquera trois à quatre mois d’indemnisation pour couvrir l’ensemble du délai-cadre.
Dans un secteur où les salaires moyens sont plutôt bas, il est illusoire de croire que les intermittents, dont beaucoup ont une famille à charge, vont pouvoir vivre trois ou quatre mois sans aucune source de revenus.
Dans ces professions, le marché de l’emploi subit des variations annuelles qui peuvent être très importantes. Aucun professionnel, même parmi les plus reconnus, n’est à l’abri d’une saison théâtrale dans laquelle il n’y a pas de rôle pour lui. Le rythme des projets culturels est par nature à géométrie variable, par conséquent la demande d’emploi sera toujours supérieure à l’offre. Il faut pouvoir compter en permanence sur un réservoir de professionnels qualifiés, afin de diversifier l’offre et correspondre à une demande toujours en mouvement.
Il est bien sûr toujours possible qu’un intermittent de spectacle cherche un emploi dans unnautre domaine que le sien. Nombre d’intermittents s’y sont résolus, et ce, d’autant plus que les périodes non travaillées sont souvent anxiogènes et mal vécues par la plupart d’entre eux. Le constat est cependant presque toujours le même: exercer un autre métier éloigne lentement, mais sûrement, l’intermittent de son champs d’activité et pour finir de sa profession.
Dans le contexte économique actuel, s’il est difficile pour n’importe qui de trouver un emploi, il est peu probable, voire impossible, d’en trouver un pour une courte période et,qui plus est, dans un domaine dans lequel le demandeur d’emploi ne possède aucune qualification.
Nombre de professionnels hautement expérimentés se verront dans l’obligation de renoncer à l’exercice de leur métier. Et il ne s’agira pas, comme on l’entend malheureusement trop souvent, d’assainir un milieu saturé. Cette épuration a déjà eu lieu il y a dix ans, lorsque la révision a fait passer de 6 à 12 mois le nombre de mois cotisés nécessaires à l’ouverture d’un délai-cadre. Il s’agira bien d’une hécatombe dont les résultats se feront sentir sur les scènes et les écrans.