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Le statut intermittent en Suisse, c’est quoi?

ACTION INTERMITTENCE, fer de lance à Genève, a obtenu en 2003 le statut dit intermittent via la LACI/OACI par voie d’ordonnance, alignant ainsi la Suisse au régime accordé en Europe, notamment en France, aux artisans de la culture que sont les personnes salariées soumis.es à des contrats à période déterminée. Notre Association a su collaborer avec les organisations nationales professionnelles et syndicales. Celles-ci ont soutenu notre démarche depuis 1997 et encore à ce jour, nous collaborons avec la Taskforce culture nationale et SUISSECULTURE dont l’Association est devenue membre.

Rappel - information législative

Il y deux statuts légaux : celui de salarié et celui d’indépendant. Ces deux statuts peuvent se combiner et sont régis par le Code des obligations du travail qui en définit le cadre juridique. Une personne qui n’a pas le statut d’indépendant doit être obligatoirement déclarée en tant que salariée au risque de pénalités importantes. Les cotisations sociales sont dues. 
– Le statut de salarié intermittent est un statut spécifique qui existe uniquement dans le cadre de l’assurance chômage grâce aux articles 12a et 8 selon la LACI via l’OACI (majoration des périodes de travail). Ces personnes ont, selon le Code des obligations du travail, un statut de salarié avec des contrats à période déterminée et des changements d’employeureuses fréquents. Ce statut spécifique dit intermittent est fédéral. Les personnes qui ne sont pas au bénéfice de l’assurance chômage ne sont pas – stricto sensu – des personnes dites intermittentes. 

La personne salariée a un lien de subordination contrairement à une personne avec un statut d’indépendant. La nature du contrat de travail et son organisation sont différents et le Code des obligations du travail en précise les modalités. Les personnes indépendantes travaillent le plus souvent de manière autonome alors que les personnes salariées intermittentes travaillent régulièrement en “troupe/ensemble/cie” et sont par conséquent soumises à des horaires et lieux précis, notamment pour les répétitions, les spectacles, productions de films etc…Il faut également signifier que l’employeur·euse ou le mandataire a le devoir de salarier une personne si celle-ci n’a pas de statut d’indépendant. C’est donc de la responsabilité de l’employeur·euse de demander le justificatif de la caisse de compensation de la personne mandatée afin de s’assurer de la légalité de son statut. Le statut d’indépendant est très précaire car il protège moins que le statut de salarié notamment au niveau des assurances sociales et en particulier auprès de l’assurance chômage.

L’intermittence n’est pas un choix, mais la conséquence d’un secteur économique qui, bien que dynamique, ne comporte pratiquement pas d’emplois à plein temps et à durée indéterminée. Le marché de l’emploi et la situation des personnes salariées intermittent·e·s dans le domaine de la culture se caractérisent, en règle générale, par l’absence d’emplois durables et la fragmentation des périodes de travail en de nombreux contrats de courte durée avec des employeur·euse·s différent·e·s. Ceci a notamment pour conséquence la multiplication des intervalles sans emploi et l’allongement du temps à consacrer à la recherche répétée de nouveaux emplois. Les personnes salariées intermittentes sont engagées avec des CDD et sont au bénéfice de l’assurance chômage. Iels sont salarié·e·x·s et ne sont donc pas des personnes indépendantes sauf si elle combinent les deux statuts. Les productions des entreprises de la culture sont le plus souvent, et par nature, limitées dans le temps. Celles-ci sont amenées à établir des contrats avec des personnes salariées intermittentes sur des périodes définies, quand bien même elles salarient éventuellement du personnel « permanent », en contrat à durée indéterminée. Ces employeuses et employeurs engagent des intermittent·e·x·s dans le cadre d’une production, pour un contrat allant d’une seule journée à plusieurs mois.

Pourquoi c'est un statut dans le cadre de l'assurance chômage ?

C’est un véritable statut car il donne des droits spécifiques en majorant les périodes de cotisation pour les personnes salariées dans le domaine de la culture. Deux articles y sont consacrés dans le texte de la LACI via l’OACI – introduit en 2003 – et en donnent une explication technique qui précise de manière claire l’organisation du travail et quelles sont les professions qui peuvent en bénéficier, à savoir : 

  • Article 12a OACI Période de cotisation dans les professions où les changements fréquents d’employeur ou les contrats de durée limitée sont usuels
    Dans les professions où les changements fréquents d’employeur·euse ou les contrats de durée limitée sont usuels (art. 8), la période de cotisation déterminée selon l’art. 13, al. 1, LACI est multipliée par deux pour les 60 premiers jours du contrat de durée déterminée.
  • Art. 8 OACI  Professions avec changements de place fréquents ou engagements de durée limitée
    Sont notamment réputées professions dans lesquelles les changements de place ou les engagements de durée limitée sont usuels, les occupations suivantes:
    • musicien;
    • acteur;
    • artiste;
    • collaborateur artistique de la radio, de la télévision ou de cinéma;
    • technicien du film;
    • journaliste.

Il est à noter que si le statut d’intermittent existe, la précarité due à la fragmentation des temps de travail et les faibles salaires fragilisent le « statut social » de ces personnes.

Pour finir, les statuts de salarié intermittent et d’indépendant sont précaires et méritent une attention toute particulière en relation avec le «statut social». En somme, les statuts existent, ce qui est problématique, c’est la précarité des personnes soumises à des emplois irréguliers avec des rémunérations ou des salaires très faibles et dans certains cas inexistants. La pratique du bénévolat est bien souvent une source d’exploitation des artistes et de concurrence extrême dans ce secteur d’activité ou les subventions du domaine publique destinées aux employeur·euse·s sont limitées.

Notes importantes

Attention ! Grande difficulté et source de malentendus sémantiques avec nos collègues d’Outre-Sarine ! Il nous faut donc informer sans relâche. Merci à vous d’être nos ambassadeurices ! 

DES MOTS À INTERROGER ET UN JARGON PROFESSIONNEL À CLARIFIER  ! 

La loi LACI/OACI définit la notion d’intermittence de manière très précise : « professions où les changements fréquents d’employeur ou les contrats de durée limitée sont usuels ». Le terme « intermittent » de même que le terme utilisé couramment en Suisse allemande « Freischaffender » n’existent pas dans les textes de lois. 

Pour ce dernier, la traduction littérale est “ travailleureuse libre “. Ceci laisse entendre qu’il peut s’agir d’une personne “ freelance ” avec un statut d’indépendant ; or, être intermittente implique d’être salariée avec des contrats à durée déterminée. Afin de préciser cette notion importante, Action Intermittence utilise dans ce dépliant les termes de “ salarié intermittent ” pour la version française et « intermittierender Angestellter » pour la version allemande au côté du terme usuel « Freischaffender ». Selon les régions linguistiques, l’usage et le sens des mots ne sont pas compris de la même manière. Clarifier ces termes au niveau juridique est nécessaire car le statut de salarié et celui d’indépendant ne donnent pas les mêmes droits. C’est pourquoi, nous intégrons ces définitions dans le lexique.

Vous trouverez dans notre campagne d’information  (chapitre III – ressourses), les  informations sur l’usage en Europe du terme “ intermittent ” qui signifie clairement la fragmentation du temps de travail pour les travailleureuses salariées ainsi que l’étude d’une sociologue sur l’usage des mots et des sens. Vous trouverez également un lien vers un document de Suisseculture Sociale qui explique le terme “ Freischaffender ”.

https://action-intermittence.ch/campagne-2023-fr/#ressources 

https://www.illustre.ch/magazine/independant-salarie